Vue de ma fenêtre à Aix-en-Provence : la majestueuse Sainte-Victoire, muse éternelle de Paul Cézanne
"Un motif étourdissant se développe du côté du levant : Sainte-Victoire et les rochers qui dominent Beaurecueil.
J’ai dit : « Quel beau motif »." (Lettre de Paul Cézanne à Émile Zola, 14 avril 1878).
Voici donc la vue de mon balcon pour Anne qui, je vous le rappelle, propose un voyage au coeur de la blogosphère à travers les "vues de nos fenêtres" :
La montagne
Sainte-Victoire, qui se dresse majestueusement à côté d'Aix-en-Provence
("petit Paris provincial" dont le charme n'a rien à envier à
l'émoustillante ville de Saint-Étienne), est LE motif cézannien par excellence.
Le peintre, obsédé par ce haut-lieu depuis que sa mère lui avait formellement interdit de s'y rendre
(elle n'aimait pas tellement les footballeurs qui y possédaient plein de maisons), Cézanne, donc,
la représenta dans plus de 80 oeuvres.
En effet, pensant que ces tableaux deviendraient vite célèbres, il s'était
dit (malin, le bougre) : "Si j'en peins 82, à 1 million de dollars le
tableau, ça me fera 82 millions de dollars et j'aurai le temps de voir
venir." Ainsi va la nature humaine. C'est d'ailleurs la raison pour
laquelle il se fâcha avec Émile Zola, ce dernier n'aimant pas les capitalistes.
Malheureusement pour Cézanne, il eut beau en peindre des tas, l'inflation n'eut
lieu qu'après sa mort mais bon, il était quand même pénard dans sa maison
du Jas de Bouffan : une bastide à Aix-en-Provence, ça vaut bien dans les 5
millions.
Quand on analyse de plus près lesdits tableaux, on constate que la figuration de la
Sainte-Victoire évolua durant les 36 années (1870-1906) au cours desquelles il
la peignit. Au début, en effet, la muse avait l'air lointaine ("tu te
cagues devant ta mère, tête d'ail", lui disaient ses copains marseillais, moqueurs).
Puis, quand il eut réglé son Œdipe, Cézanne osa s'aventurer plus près de la
montagne à la courbe inimitable et se rendit au Tholonet,
où il loua une chambre et se lia d'amitié avec Marcel Desailly. Il s'installa
sur un petit chemin qui sentait la noisette avec son chevalet, ses toiles, sa
palette, ses pinceaux et son iPod Nano sur lequel il avait fait graver ces mots : "Hortense forever".
Pour se protéger des
renards qui voulaient copier ses tableaux futurement estimés à 1 million de dollars (l'un), il se cachait
sous des ombrelles de paysagistes, ce qui lui valut de se faire traiter de
"tapette" par ses collègues marseillais. Mais il avait l'habitude de
leurs galéjades et ne s'en formalisa pas.
C'est ainsi qu'il passa le reste de sa vie calé dans son petit chemin, à
peindre des Sainte-Victoire. Et moi, chanceuse parmi les chanceuses, je vis
dans un sublime appartement donnant sur le plus célèbre des paysages
cézanniens.
Je vous mets une photo en sépia afin que vous puissiez découvrir les magnifiques contrastes de la Sainte-Victoire d'un
oeil nouveau :
Elle est belle, n'est-ce pas ?