Histoires de livres, d'îles désertes et de tentations immorales
Quoique...
m'a transmis le questionnaire des Agapes sur les livres de cuisine, auquel je
pense pouvoir répondre sans que le monde entier connaisse les adresses
exactes des endroits où j'ai vécu, le digicode de la porte d'entrée de
mon immeuble et mon numéro de sécurité sociale (en même temps, c'est un
peu prétentieux de dire "le monde entier", mais on peut toujours
rêver).
Quel livre aimeriez-vous partager avec un amateur ?
Sans aucun doute le "Reboul" (Éditions Paul Tacussel), composé en 1897 et régulièrement réédité. C'est la mémoire culinaire de la Provence. On y trouve pas moins de 1200 recettes (sans ordi et sans Internet, vous imaginez le boulot ?), dont celle des fameux "pieds et paquets à la marseillaise" que je vous ai donnée il y a quelques temps.
On y apprend que la
bouillabaisse est le plat convivial par excellence : « une bouillabaisse, pour être servie selon la règle usitée à
Marseille, dans de parfaites conditions, demande au moins 7 à 8 convives. La
raison, la voici : comme on emploie à sa confection une grande variété de
poissons dits de roche, il est bon de la faire volumineuse pour y faire entrer
le plus d’espèces possible. »
On y découvre encore une "Théorie du pot-au-feu" qui devance d'un siècle Ferran Adria :
« Avant d’entrer en matière, il est,
croyons-nous, de toute rigueur d’expliquer en quelques lignes, par une théorie
un peu développée, cette opération si simple qu’on nomme pot-au-feu et qui, en
somme, est une action toute chimique ».
J'ai été conquise, il y a quelques années, par les Méditerranées d'Alain Ducasse (Hachette, 1996), et d'abord parce que j'adore quand cette mer-là devient plurielle (pardonnez-moi ce lyrisme à deux balles, mais la cuisine, c'est peut-être le seul élément pacifique de cet endroit du globe).
Ce livre, je l'ai offert plusieurs fois, mais uniquement à des gens que j'aime beaucoup (j'offre Critique de la raison pure ou un cygne en cristal Swarovski aux gens que je n'aime pas). Il propose environ 130 recettes plutôt faciles à réussir : frottée d’ail confit au pain de campagne, crostini de tapenade aux artichauts "violet de Venise", l’histoire de l’œuf coulant sur la pomme de terre, tajine slaoui aux tomates, œufs et boulettes de "kefta", risotto à l’encre de seiche, tian d’oranges amères au jus de mandarine… C'est irrésistible.
Celui que vous emporteriez sur une
île déserte ?
Si
mon avion Oceanic Airlines* s'écrasait sur une île déserte, j'aimerais
avoir mis dans ma valise, par le plus grand des hasards, la trilogie de Jean-Claude Izzo (Total Khéops, Chourmo, Solea),
pour revivre Marseille et pour baver devant les descriptions de figatelli grillés,
de tomates
à l'huile d'olive et au basilic, de poivrons farcis et de sars au
fenouil.
Ce serait tout de même très déprimant, j'imagine, de lire tout
cela en ayant pour seule pitance des mangues et des oiseaux décédés de
mort naturelle (si vous croyez que je sais chasser).
Mais de
toute façon, je ne lirais pas, bien trop occupée
avec Jack,
Sawyer et Sayid, donc cette question ne servait à rien.
* Oceanic Airlines est la compagnie
aérienne de Lost, je le précise pour les extraterrestres et les grands
malheureux qui ne seraient pas encore accros à la série.
Une déception ?
Critique de la raison pure,
donc, mais ça n'a rien à voir. Je ne peux pas à proprement parler
affirmer que j'ai été déçue, puisqu'en réalité, je n'ai rien compris.
Mais bon, c'était au lycée, il y a prescription.
Vos derniers achats ?
M'en souviens pas, c'était il y a trop longtemps. En effet, contrairement à ce que disent Brad, ma mère, mon père et
ma banquière, je ne dépense pas tellement, je trouve.
Le dernier livre de cuisine que j'ai acquis, c'est en fait ph10 de Pierre Hermé, grâce à ma recette de millefeuille à la mousse au chocolat, aux oranges confites et au granité de basilic. C'était à l'occasion du concours chocolat organisé par Epicurien.
Je ne me lasse pas de le feuilleter (même s'il m'intimide beaucoup), car les photos sont sublimes et les recettes plus qu'appétissantes. Pour
l'instant, je n'y chipe que des idées, mais dès que je m'en sentirai
capable, je tenterai les magnifiques "Miss Gla-Gla", sandwhichs multicolores qui se composent de glaces prises entre deux biscuits aux macarons.
Vos prochains achats ?
Tentations, de Philippe Conticini ? Goûte ça et épouse-moi ?
Ou plutôt Recettes immorales de Montalbán, je suis sûre que ce serait plus efficace pour prendre Brad dans mes filets.